Propositions
Beating poverty Battre en brèche la pauvreté
Détails de la proposition
Contexte

 

SHAKING EUROPE : L’EUROPE SERA CELLE DES PEUPLES OU NE SERA PAS !

L’UNION EUROPÉENNE AURAIT-ELLE ÉGARÉ SA BOUSSOLE ?

 

Perdue dans l’impasse du tout au libéral, l’Europe sociale et solidaire peine en tout cas à se frayer un chemin. Le modèle social européen devait être « fondé sur un niveau élevé de protection sociale, d’éducation et le dialogue social […] un équilibre entre la prospérité économique et la justice sociale » (Conseil européen de Barcelone, 2002).

Il se résume aujourd’hui à quelques concessions frileuses d’États repliés sur eux-mêmes, à un assemblage de bouts de ficelles censés gérer les conséquences de la crise.

 

À côté de ça, les budgets publics se réduisent comme peau de chagrin, les systèmes de protection sociale et de solidarité intergénérationnelle sont démantelés, le marché du travail se précarise…

 

Non seulement le modèle de globalisation libérale a nié l’intérêt des peuples mais il n’a pas tenu ses promesses économiques. Ni justice sociale, ni prospérité économique donc… Il est aujourd’hui temps d’emprunter une autre voie, celle d’une Europe au service des peuples !

 

De nombreuses expériences locales, citoyennes et/ou d’économie sociale et solidaire, voient le jour. Elles demeurent méconnues et ne mesurent pas toujours leur poids collectif, notamment au niveau européen. Volontiers reconnues sur leur territoire lorsqu’elles pallient les inégalités sociales que les autorités publiques n’ont pas été en mesure de réguler, elles éprouvent davantage de difficultés à se faire entendre dans leurs propositions de modèles alternatifs de gouvernance mondiale.

 

La Fondation Charles Léopold Mayer pour le Progrès de l’Homme, le Mouvement Européen International et l’Institut des Hautes Études des Communications Sociales ont décidé de leur donner la parole, au sein de cahiers thématiques de propositions !

 

Esther Durin – IHECS

 

LA LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ NE PEUT ÊTRE LA CINQUIÈME ROUE DE LA CHARRETTE EUROPÉENNE ! RIDEAU ?

2010, année européenne de lutte contre la pauvreté s’est achevée. Place à 2011. Le bal est terminé ? On éteint les lampions de la fête ? On ferme laporte de la salle à double tour ? On passe à autre chose ? Rideau ?

Non, bien sûr. Car personne, sérieusement, n’envisageait que cette année européenne (dont les activités ont été coordonnées par la Commission européenne) aboutisse à des changements structurels, quasi miraculeux, en un laps de temps aussi court. Une année européenne sert à sensibiliser, à alerter, à amorcer. Et puis, le bilan des actions « 2010 », au plan européen et dans les États membres, reste à affiner, avec le nécessaire recul. On mesurera dès lors l’impact réel de cette « sensibilisation », durant douze mois, à la lutte contre la pauvreté.

 

Mais nul besoin d’attendre cette évaluation pour se rendre compte que l’année européenne 2010 n’a pas changé la face du monde. Pire, cette année, pour les citoyens européens, aura été, sur le plan social et des conditions quotidiennes d’existence, une « annus horribilis ».

 

2010, ANNUS HORRIBILIS

 

En 2009, les États européens avaient été touchés de plein fouet, selon l’effet domino, par la crise bancaire mondiale, la pire crise financière planétaire depuis « 1929 ». Avec, aussitôt, de premières conséquences sur le vieux continent : fonte comme neige au soleil des économies engrangées sous forme d’actions, souvent durant toute une vie, par les petits épargnants ; difficultés croissantes rencontrées par les ménages à faibles revenus pour emprunter ; crédit délivré désormais au compte-gouttes aux petites et toutes petites entreprises, asphyxiant nombre d’entre elles, alors qu’elles constituent le plus grand réservoir de création d’emplois en Europe.

 

Les États, de leur côté, ont alors sauvé le secteur bancaire de la faillite, à coups d’aides financières massives, sans beaucoup de garanties exigées pour que, à l’avenir, ce secteur soit empêché de produire ces activités spéculatives et nuisibles à l’intérêt général. Les États ont délié les cordons de leur bourse (alimentée avec les impôts des citoyens). Ils ont fait face, aussi, en 2010, en raison du recul de la consommation et de la moindre capacité d’investir des particuliers et des petites entreprises, à des recettes moindres.

 

UNE SITUATION INTENABLE

 

Des dépenses en plus. Des recettes en moins. La situation est difficilement tenable. En 2010, les « marchés » (c’est-à-dire les opérateurs qui détiennent les créances sur les dettes d’État, des opérateurs qui, curieusement d’ailleurs, sont parfois des établissements bancaires ayant bénéficié de cadeaux financiers considérables de la part des États) s’affolent, spéculent contre les États les plus en difficultés, imposent des hausses drastiques de taux de remboursement, acculant certains d’entre eux (la Grèce, l’Irlande, le Portugal…) au bord de la faillite.

 

L’euro est en danger. Il peut et il doit être sauvé. Mais les États les plus puissants de la zone euro, l’Allemagne en tête, imposent leurs conditions : il faut contraindre, non seulement les États à deux doigts de la banqueroute, mais également l’ensemble des États européens, à mettre en œuvre des plans draconiens de réduction des dépenses publiques.

 

LE CHEMIN EMPRUNTÉ, UNE IMPASSE ?

 

Pour retrouver l’équilibre, nous pourrions imaginer accroître l’assiette de certaines recettes, en levant une taxe sur les transactions financières (la taxe Tobin) ou en harmonisant au plan européen la fiscalité sur le bénéfice des entreprises. Nous pourrions aussi réduire certaines dépenses : militaires, par exemple. Nous pourrions investir massivement dans de grands ouvrages créateurs d’emplois, de bien-être social, de bien-être tout court : l’éducation, la culture, l’environnement, la santé, l’aide aux personnes âgées, le soutien aux jeunes en quête de jobs…

 

Le chemin suivi par les chefs d’État et de gouvernement n’est pas celui-là. C’est le chemin de l’austérité obligatoire, d’une compression massive des dépenses publiques liées au social. Une seule certitude à l’horizon : l’exclusion sociale va progresser dans tous les États européens, sous le coup de ces politiques. Tel est le bilan essentiel de l’année 2010. Telle est la perspective pour 2011.

 

LA FIN DE L’ÉTAT PROVIDENCE, LA FIN D’UN COMPROMIS

 

Or voilà, ces coups de « tournevis sociaux » ne seraient qu’un moindre mal s’ils assuraient une reprise durable de schémas de cohésion sociale pour le futur, et si la situation actuelle, en matière de pauvreté et d’exclusion, ne présentait pas l’aspect dégradé qu’elle revêt aujourd’hui.

Depuis la seconde guerre mondiale, dans l’Europe de la CEE puis de l’Union européenne, plusieurs phases se sont succédées.

 

La période, tout d’abord, des « trente glorieuses » : les trente années de croissance économique forte qui, même si elles n’ont pas entraîné la production de richesses également réparties, ont amené un progrès social linéaire pour les catégories les plus désavantagées. L’État providence veillait au grain, conciliant le mécanisme de l’économie de marché avec des mécaniques de régulation de l’économie, ainsi que des dispositifs forts contribuant à diminuer les disparités : impôt direct progressif, sécurité sociale.

 

Les clochards peuplaient encore les stations de métro dans les grandes villes. Les ouvriers travaillaient dur, pour de petits salaires. Mais le travail était facile à trouver. Et il permettait de sortir de la misère noire. Par ailleurs, l’ascenseur social fonctionnait. Pour qui pouvait faire de belles études, une situation meilleure se présentait. Puis vint la crise pétrolière mondiale et un changement de paradigme à la fin des années 70. La croissance s’effondre. La dette des États doit être jugulée. Les premières réductions de dépenses sociales sont opérées.

 

COMMENT REGAGNER LA BERGE ?

 

Les années 80 n’apportent pas d’amélioration. Les chômeurs deviennent progressivement de « longue durée ». Quand on est exclu de la société, on regagne de plus en plus difficilement le bord de la berge. L’Europe du grand marché, réalisée en 1992, est censée apporter la résolution du problème, le supplément de croissance attendue, qui permettra de renouer avec la progression sociale. Certes, les disparités diminuent entre les États. Mais la compétitivité « libre et non faussée » n’empêche pas (malgré les effets positifs des Fonds structurels européens) le grand écart de richesses entre les régions en Europe.

 

Entre temps, la pauvreté progresse. Pas seulement en nombre de personnes qui ne disposent pas du standard de revenus jugés indispensables. Elle s’élargit aussi en termes de catégories touchées : les jeunes (pour la première fois, ils savent qu’ils auront une vie plus difficile que leurs parents), les travailleurs (jadis à l’abri), les personnes âgées (dont les retraites maigrissent avec le temps), mais aussi (phénomène très récent) certaines catégories de couches moyennes.

 

On assiste à un double phénomène. D’une part, des fractions croissantes de la population se précarisent, sont menacées de pauvreté et tombent plus facilement du haut de l’escalier. D’autre part, les personnes qui ont chu et connaissent la pauvreté remontent toujours plus difficilement la pente.

 

DE BONNES INTENTIONS

 

Quelles réponses l’Union européenne apporte-t-elle, au-delà de ses orientations actuelles : discipline de fer financière, compression des dépenses publiques et sociales ?

 

En mars 2010, Manuel Barroso, président de la Commission européenne, dévoilait sa proposition de stratégie européenne pour les années 2010-2020, une stratégie « pour une croissance intelligente, durable et inclusive ». L’un des cinq objectifs annoncés de cette stratégie est de réduire d’au moins 20 millions le nombre de personnes confrontées au risque de pauvreté ou d’exclusion sociale dans l’Union européenne. Belle annonce, mais comment les bonnes intentions seront-elles mises en pratique ?

 

DES ALTERNATIVES CONCRÈTES

 

La Fondation pour le Progrès de l’Homme (FPH) n’est pas un « lobby », n’est pas une fédération d’organisations. Elle ne représente personne et certainement pas un parti. Son ambition est de soutenir, à travers les modestes moyens financiers qu’elle peut mobiliser, des porteurs d’initiatives, des actions exemplaires œuvrant au développement durable, à la cohésion sociale, à l’encouragement d’une citoyenneté active.

 

En 2008, la FPH s’est dotée d’une « unité Europe », soulignant ainsi sa conviction d’une Europe citoyenne et démocratique. Les peuples ont besoin d’union, d’intégration. Mais cette nécessaire intégration ne peut s’opérer sans cohésion et progrès sociaux. En d’autres mots, le progrès social est consubstantiel au projet européen. Sans social, l’Europe est menacée dans ses fondements. Voilà pourquoi, s’attaquer aux phénomènes de pauvreté, durablement, en s’attaquant à la racine, interpelle l’ensemble du projet européen. Voilà pourquoi la réduction significative et effective (ce qui ne se fera pas par de simples effets d’annonce, en l’absence d’une vision d’ensemble articulée entre les dimensions économique, sociale et environnementale) ne doit pas être la « cinquième roue » de la charrette européenne.

 

MIEUX ENTENDRE LES ACTEURS DE TERRAIN

 

Dans ce vaste et ambitieux chantier, toutes les énergies sont indispensables. Les acteurs de terrain, les associations citoyennes locales dans les différents pays européens, sont forts d’une très grande expertise sur le plan social et de la lutte contre la pauvreté. Porteurs de propositions souvent innovantes, susceptibles d’être reprises à large échelle.

Malheureusement, ces acteurs et associations disposent de peu de moyens et sont insuffisamment écoutés dans le concert européen.

 

CINQ PROPOSITIONS DE FOND

 

Pendant plusieurs mois, l’équipe de l’Institut des Hautes Études des Communications Sociales (IHECS) de Bruxelles, appuyée par la FPH, est partie à la rencontre de quelques uns de ces acteurs et associations, qui sont aux premières loges. Elle leur a demandé quelles sont leurs solutions de fond pour combattre la pauvreté, à la lumière de leurs propres expériences.

 

L’IHECS a retenu 5 suggestions. Elles ne prétendent, évidemment, à aucune exhaustivité. Elles ne sont en aucun cas une potion miracle. Toutefois, elles ont le mérite d’attirer l’attention sur des questions nodales, voire peu explorées. Si elles sont retenues en haut lieu, elles pourraient constituer des leviers de changements.

 

… ADRESSÉES AU PARLEMENT EUROPÉEN

 

Nous adressons ces propositions originales à l’ensemble des parlementaires européens. Car les élus à Strasbourg sont le poumon démocratique de l’Union européenne. En ces temps de grande turbulence pour l’Europe et ses populations, c’est d’eux (et des citoyens qui les élisent) que pourront venir les initiatives nouvelles, le vent frais indispensable.

 

« UTOPIE AUJOURD’HUI, CHAIR ET OS DEMAIN ! »

 

Certains de nos lecteurs trouveront ces cinq suggestions un brin « utopistes ». Ils auront raison, elles le sont. Mais justement, l’histoire n’a-t-elle pas enseigné que les rêves éveillés deviennent les réalités de demain. Souvenons-nous de ces mots de Victor Hugo, appelant déjà à la création des États- Unis d’Europe : « Utopie aujourd’hui, chair et os demain ! ».

 

 

Propositions et résumés

…BATTRE EN BRÈCHE LA PAUVRETÉ…

 

Des acteurs de terrain adressent au Parlement européen CINQ propositions, CINQ leviers pour faire bouger les lignes… Ils proposent :

  • 1. L’association portugaise « In Loco » : POUR booster les régions défavorisées, IL FAUT un Programme d’Initiative Communautaire intégré à partir de 2013.
  • 2. L’association française « Habicoop » : POUR améliorer l’accès au logement, IL FAUT une exonération fiscale européenne pour les coopératives d’habitants.
  • 3. L’association belge « Dynamo International » : POUR secourir les jeunes précarisés, IL FAUT créer un statut européen des « travailleurs de rues ».
  • 4. L’association française « Pactes locaux » : POUR combattre la pauvreté, IL FAUT inscrire l’innovation sociale au cœur des Fonds structurels 2014-2020.
  • 5. La fondation roumaine « Tiabari »: POUR s’attaquer aux inégalités de santé dans les régions rurales, IL FAUT ériger les soins de santé primaires en « service universel ».

 

 

 

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