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Now is the time: why Rio+20 must succeed L‘heure est venue! Pourquoi « Rio+20 » doit réussir

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En juin 2012, les dirigeants mondiaux se réuniront à Rio de Janeiro pour la Conférence des Nations unies sur le développement durable (« Rio+20 »), afin de promouvoir le passage à une économie verte mondiale dans le contexte du développement durable et de l’éradication de la pauvreté. Les gouvernements se sont également engagés à lancer une réforme très attendue du cadre institutionnel des Nations unies en matière de développement durable. Nous appelons les chefs d’État et de gouvernement à saisir cette occasion historique pour prendre des décisions audacieuses plutôt que de persister dans un processus d’avancées à la marge dans la continuité de l’existant.La communauté internationale est parvenue à un consensus fort et une vision ambitieuse indiquant que le monde a besoin d’un modèle plus intelligent et plus global en matière de développement durable et d’éradication de la pauvreté. Ce modèle est censé assurer que « le développement économique, le développement social et la protection de l’environnement [...] seront intégrés de façon équilibrée », tel que le réaffirme la résolution de l’Assemblée générale de l’ONU qui convoque la Conférence 2012 des Nations unies sur le développement durable.

 

De plus, il est entendu que les Nations unies doivent faciliter la transition mondiale vers une économie verte au moyen d’une réforme institutionnelle adéquate. De telles déclarations d’intention ont déjà été entendues par le passé. Trop d’occasions ont été manquées et trop d’engagements n’ont pu être tenus. La pauvreté reste un défi permanent, même si l’économie mondiale croît à un rythme impressionnant. Et l’environnement continue d’être exploité comme si notre planète était sans limites. Au vu des risques systémiques sans précédent auxquels le monde est confrontés, illustrés ces dernières années par la triple crise de la stabilité financière, de la sécurité alimentaire et du réchauffement planétaire, l’heure est venue d’agir, enfin : Rio+20 est une occasion unique pour finalement réconcilier la prudence économique, la responsabilité sociale et la prise de conscience environnementale. Il ne faut pas passer à côté de cette nouvelle chance !

 

Une économie verte au service du développement durable

Alors que le monde se prépare à Rio+20, la notion d’« économie verte » est devenue prégnante.Elle donne une impulsion nouvelle et propose un cadre général pour transformer l’économie mondiale en un système global plus productif, réellement durable, socialement responsable, et prenant en compte les questions de développement et d’équité. L’Assemblée générale de l’ONU a ainsi reconnu l’économie verte comme un cadre concret permettant de réunir les piliers économique et environnemental du développement durable ; elle a également souligné la nécessité de s’orienter vers une économie verte dans le contexte du développement durable et de l’éradication de la pauvreté. Une économie verte aspirerait donc à concrétiser des potentiels d’innovation, à exploiter des sources énergétiques renouvelables sobres en carbone, à favoriser l’accès aux technologies vertes, à construire des infrastructures et des villes « intelligentes » qui utilisent les ressources de manière efficace, à créer des emplois et à valoriser les services environnementaux, tout en maintenant la réduction de la pauvreté et les considérations d’équité comme ses objectifs transversaux prioritaires. Elle offrirait ainsi aux pays développés et en développement des leviers d’action rationnels et des instruments adaptés pour la mise en œuvre du développement durable dans un cadre cohérent, où l’ambition globale et l’approche bottom-up (« du bas vers le haut ») de la prise de décision se complèteraient et favoriseraient l’atteinte de cet objectif.

 

Nous demandons donc à nos gouvernements de traduire la notion visionnaire d’une économie verte en une feuille de route concrète pour agir. Lors du sommet Rio+20, les dirigeants mondiaux devront répondre à cet appel et convenir d’une stratégie verte ambitieuse donnant la priorité aussi bien au développement durable qu’à l’éradication de la pauvreté. En tant que telle, cette stratégie devra être suffisamment solide pour servir les générations actuelles et futures du monde entier, et suffisamment souple pour répondre aux besoins de chaque pays.

 

Pour un système onusien cohérent

L’ONU a un rôle déterminant à jouer dans la mise en œuvre d’une vision de portée aussi universelle. Pourtant, dans la situation actuelle, elle ne dispose pas des moyens nécessaires à la réalisation de cette ambition. À Rio, il faudra que les gouvernements permettent enfin aux institutions de l’ONU de respecter leur mandat ! Le maintien prolongé du statu quo est inopérante et tout simplement inacceptable. Les politiques incohérentes, l’allocation incertaine et insuffisante des fonds et la fragmentation des institutions – facteurs exacerbés par des querelles inter-organisationnelles – provoquent l’augmentation des coûts de fonctionnement du système et empêchent d’obtenir des résultats efficaces. Les aspirations des pays développés comme celles des nations en développement s’en trouvent finalement entravées. Ainsi que l’a souligné le Groupe de haut niveau du Secrétaire général sur la cohérence de l’action du système des Nations unies dans son rapport « Unis dans l’action » (Delivering as One, 2006), l’ONU exige une plus forte autorité et de meilleurs instruments afin d’être véritablement en mesure de promouvoir le développement durable. Cette exigence est capitale en matière de gouvernance internationale de l’environnement.

 

Une avancée décisive pour stimuler la gouvernance internationale de l’environnement

Tout comme le système financier mondial, l’environnement planétaire est confronté à des risques systémiques importants mettant en danger le système international, l’économie mondiale et, par voie de conséquence, les perspectives de développement humain. Il est urgent de lui trouver un défenseur d’envergure mondiale faisant autorité. En effet, la préservation de l’environnement mondial est dans l’intérêt de tous : alors que les coûts de l’inaction seront immenses pour les pays développés comme pour les pays en développement, le développement durable intégré àune économie verte peut bénéficier à tous. Pourtant, le processus d’avancées à la marge dominant dans la gouvernance internationale de l’environnement ne permet d’obtenir que des résultats largement insuffisants, très éloignés de ce qui est nécessaire. À Rio, les gouvernements devront dépasser ce processus délétère de la réforme de l’ONU. Si les Nations unies veulent effectivement donner l’exemple en matière de réflexion et de mise en œuvre du développement durable, le sommet Rio+20 doit aboutir à des décisions de grande portée en matière de gouvernance internationale de l’environnement. Suivant le principe selon lequel la forme doit être définie après la réflexion sur la substance, toute réforme importante de la gouvernance internationale de l’environnement devra correctement refléter les problèmes de développement de chaque pays, dans des limites écologiquement responsables. À cette fin, les agences environnementales des Nations unies devront être à l’écoute, réactives et cohérentes avec les objectifs plus larges de développement. Un financement adéquat et lisible, ainsi qu’une base scientifique solide et des engagements crédibles en matière de renforcement des capacités et de transferts de technologies seront essentiels pour instaurer et maintenir une appropriation et une confiance universelles.

 

Répétons-le : même s’il existe un consensus intergouvernemental général et explicite sur ces objectifs fonctionnels de réforme future, la réalité de la gouvernance internationale de l’environnement ne suit pas. Dans le même temps, les délibérations intergouvernementales ont abouti à la présentation de deux options concrètes pour mettre fin au statu quo :

  • Une organisation « parapluie » permettant de restructurer le fonctionnement même de l’ONU quant à ses politiques environnementales et de développement durable ;
  • Une agence spécialisée de l’ONU s’appuyant sur le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), soit la pièce maîtresse de l’architecture actuelle de la gouvernance internationale de l’environnement.

 

A priori, aucune option ne peut être considérée meilleure qu’une autre. L’attention portée aux détails sera primordiale. Les deux options vont clairement au-delà de l’incrémentalisme qui a parle passé entravé la réforme de la gouvernance internationale de l’environnement. Chaque option nécessitera des décisions audacieuses à Rio, y compris un mandat clair pour une réforme plus globale.

 

A la recherche de leaders !

À un an de l’événement, on ne peut attendre beaucoup des préparatifs intergouvernementaux. Jusqu’à présent, l’approche business as usual domine, et semble se complaire dans son manque d’ambition et de sens de l’urgence. Pour faire de Rio+20 une étape charnière, un tournant décisif, les enjeux doivent être plus ambitieux, et le rythme des préparatifs de toute urgence accéléré. Il faut pour cela un leadership politique fort ! Les chefs d’État et de gouvernement ne doivent pas considérer Rio+20 comme un sommet de plus, à moins qu’ils ne cherchent délibérément à affaiblir le potentiel d’un processus multilatéral.

À l’heure actuelle, les gouvernements préparent un projet de document final pour Rio+20. S’ils ne parviennent pas à proposer de grandes idées et des plans d’action audacieux pour ce sommet, c’est une occasion unique qui finira à la poubelle ; dans le contexte des crises mondiales actuelles,  la fenêtre d’opportunité représentée par Rio+20 se refermerait probablement pour les années à venir. Si l’objectif est bien de mettre la transformation en cours de l’économie mondiale en phase avec les capacités et les ressources de la Terre, l’ajournement et le processus d’avancées à la marge ne sont donc plus pardonnables. Dans ce contexte, ce n’est pas trop demander à nos gouvernements que d’être à la hauteur de leur responsabilité collective ! Nous les prions donc de faire du sommet Rio+20 et des thèmes qui ont été convenus par consensus une priorité, en les inscrivant sans plus tarder à leurs agendas nationaux. Ils pourront ainsi préparer leurs sociétés à une transition vers une économie verte, dans le contexte particulier de leur propre pays, et permettre enfin à l’ONU d’agir en tant que défenseur mondial du développement durable, notamment en renforçant son autorité dans le domaine de la gouvernance internationale de l’environnement. « C’est maintenant ou jamais »signifie également qu’il n’est pas – encore – trop tard !

 

  • Dr. Marianne Beisheim et Nils Simon, projet de gouvernance environnementale internationale, Institut allemand de politique internationale et de sécurité (SWP), Berlin, Allemagne
  • Prof. Roberto P. Guimaraes, professeur en gestion de l’environnement, fondation Getulio Vargas, Rio de Janeiro, et professeur invité en environnement et société, université d’État de Campinas, Sao Paulo, Brésil
  • Prof. Patricia Kameri-Mbote, directrice, International Environmental Law Research Centre, Nairobi, Kenya
  • Dr. Xue Lei, chargé de recherche, Center of International Organizations and International Law, Shanghai Institutes forInternational Studies, Chine
  • Johannes Linn, chercheur senior résident, Emerging Markets Forum, et chargé de recherche senior non résident en économie mondiale et développement, Brookings, Washington D.C., États-Unis
  • Prof. Dirk Messner et Dr. Steffen Bauer, Institut allemand pour le développement / Deutsches Institut für Entwicklungspolitik (DIE), Bonn, Allemagne
  • Mutsuyoshi Nishimura, ancien ambassadeur du Japon pour l’environnement mondial
  • Prof. Elizabeth Sidiropoulos, directrice nationale, Institut sud-africain des affaires internationales (SAIIA),Johannesburg, Afrique du Sud
  • Dr. Leena Srivastava, directrice exécutive, TERI, New Delhi, Inde, et vice-présidente senior, TERI-Amérique du Nord,Washington D.C., États-Unis
  • Prof. Laurence Tubiana, directrice fondatrice, Iddri, Paris, France, et directrice, chaire Développement durable,Sciences Po Paris, France
  • Prof. Yizhou Wang, directeur adjoint, Institute of World Economics and Politics (IWEP), Chinese Academy of Social Sciences (CASS), Pékin, Chine

 

 

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